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La vie du Château

A la croisée des chemins

Le château n’a certainement pas été bâti à Saint Elix par hasard : le village, facile d'accès est situé sur le tracé de l’ancienne voie romaine, qui fut “La Voie Royale” avant de devenir “la route nationale” puis l’actuelle A64, une très stratégique croisée des chemins géopolitiques en cette période charnière qui sonne la fin du moyen âge, l’avènement de la renaissance et les prémices des guerres de religion dont la région sera le théâtre.

Une période tour à tour faste et violente

De la fin du XVe siècle au XVIe siècle, Toulouse connaît une période de grande prospérité, grâce à l'industrie du pastel. C'est l'époque de construction de grands hôtels particuliers, mais en 1560 les protestants et les catholiques s'affronteront dans de sanglants combats plongeant la région dans le chaos.

 En mars 1473 le roi de France reprend Auch, la cité gasconne, ce qui entraîne l’effondrement du comté d’Armagnac, un siècle plus tard, avec la Réforme, vont débuter les guerres de religion, particulièrement violentes et destructrices en Gascogne centrale entre 1560 et 1590, épisode qui va à nouveau déstabiliser toute l’Occitanie.  

Cathares, huguenots, rebelles et récalcitrants du sud ont toujours agacé la papauté, ainsi les rois de France ayant fait allégeance au Vatican seront sommés, à défaut de faire entrer les mécréants dans les ordres, de les faire rentrer dans l’ordre papal.  

Au centre d’un petit monde sous bonne garde

A la limite de la Gascogne et du Languedoc, entre Toulouse, passé sous capitulât, comté de Comminges que les alliances ont ramenées dans le giron royal, Gascogne soumise et comté de Foix où règne Henri de Foix, époux de Marguerite de Navarre, la propre sœur de François I°, enfin sous contrôle, les astres sont en parfait alignement. François I° ayant posé ses pions, il ne peut qu’encourager l’initiative de son secrétaire à implanter en ce lieu névralgique, l’imposant et magnifique château de SAINT ELIX qui surprend par son style renaissance si inattendu loin de la Loire, dans une région qui doit sa fortune à la culture du pastel et du lin. 

Édifié entre 1541 et 1548 par l'architecte Laurent Clary qui traça également les plans du Donjon du Capitole, actuel Office de Tourisme de Toulouse, il fut bâti à la demande de Pierre Potier, Seigneur de la Terrasse, Secrétaire de François I° et fut construit sur les ruines d'un pavillon de chasse. La forêt de Bouconne est à nos portes, et justement, le roi adore par-dessus tout chasser le cerf ! à tel point d’ailleurs qu’il décrètera le cerf "chasse royale”, n’accordant plus le privilège du cervidé qu’à ses protégés, qui enorgueillis, s'empressèrent d’exposer les trophées aux murs de ce qui va devenir une sémantique de caste : la “Galerie aux cerfs”. Le décor est planté, les travaux peuvent commencer !

Un fabuleux chantier

L'histoire nous a légué un cadeau mémoriel de choix : une dizaine de “baux à besognes”, aujourd'hui on parlerait de “cahier des charges”.

Ces baux révèlent par le menu détail les marchés passés avec les maîtres d’œuvre : sculpteurs, charpentiers, maçons, plombiers, couvreurs, maitre verriers, tailleurs de pierres; C’est ainsi que de source avérée, nous connaissons l'origine des matériaux de construction et leur mode d'acheminement sur le chantier, que nous savons combien de journaliers ont travaillé à l'édification de la structure, combien et comment ils étaient payés  !!, nous connaissons l'épaisseur des murs, l’impensable prouesse technique de leur mise hors d'eau, nous connaissons le petit nom de chacune des tours : la Tour de Gondran, la Tour François I°, la Tour de Saint Elix , et la Tour de l'Horloge, car le château de Saint Elix est une des premières demeures du début de la Renaissance à posséder une horloge alors que seules quelques tours capitulaires de Toulouse pouvaient s'enorgueillir de ce signe du progrès au milieu du XIV° siècle,  nous avons également connaissance d'un précieux et truculent échange épistolaire entre Pierre POTIER Seigneur de la Terrasse et Maître LEBOYER, l'horloger toulousain qui réalisa cette pièce unique nichée dans le lanternon de la tour nord-est

Trois générations de Potier de la Terrasse, se succédèrent au château, Vint ensuite Antoine-Arnaud de Pardailhan, et son épouse Paule de Saint-Lary de Bellegarde, c’est à ces occupants que l'on doit l'édification de la splendide cheminée de l'Ecole de Fontainebleau” . Cette œuvre magistrale nous dévoile les subtilités architecturales du néo classicisme en vogue au XVI° siècle : puttis, cornes d'abondance, doubles cariatides, et encorbellements. Cette cheminée arbore en son blason des armoiries qui ont fait longtemps jaser et déchirer les érudits en héraldique, jusqu'à ce qu'en 2005, un professeur de l'Ecole du Louvre en décrypte les mystères et nous livre les fruits de sa pertinente lecture !

Hommes de cour, talentueux artistes, esprits novateurs, ont auréolé le château d'une riche histoire. Mais, curieusement aucune famille, aussi fortunée ou prestigieuse fut elle ne conserva la demeure plus de trois générations. Capitouls, Greffier du Parlement, Maréchal de France, s’y succédèrent, puis au tournant du XVII° siècle, il échoua au célèbre et infortuné Marquis de Montespan, qui y fit jouxter perrons, écuries et une magnifique Orangerie où on distilla jusqu'au XIX° siècle une eau de fleur d'orangers fort recherchée.

Le Duc d’Antin, fils unique du marquis, le vendit à un archevêque qui y hébergera deux moines bénédictins auxquels on doit la rédaction de la majeure partie de l'Histoire du Languedoc. 

Contemporain de la Révolution française, le Baron Jean Charles LEDESME, agrémenta les jardins, apporta de délicats et fastueux embellissements sur tout le domaine. C'est au célèbre sculpteur toulousain, François Lucas que cet ami des arts  confia la décoration du "Salon Bleu", la réalisation de la coquille de marbre, des stucs de la salle à manger, des bustes des empereurs romains qui jalonnaient l'escalier monumental,  ainsi que les statues du parc, dont la célèbre “Statue du Commandeur” qui trônait dans une niche de style roman au cœur de l'Orangerie, sans oublier les lions qui défendaient l'entrée de la cour d'honneur .Toutes ces œuvres ont été pillées, ne demeurent que les sphinges qui ornent le portail de la façade nord, la légende rapporte que des membres de la noble famille furent les modèles de l'artiste. Après la révolution, c’est sur ordre de la Convention que les tours alors dites “en bulbe d’oignen” furent découronnées.

De prestigieux occupants

Après la Révolution, de nombreux propriétaires se succédèrent. Les CARRERE, descendants de la seconde épouse du dernier Baron le garderont durant une grande partie du XIX° siècle. Leur histoire chaotique, émaillée de faillites, de revers de fortunes, les obligera à vendre les meubles pour tenter de sauver les murs. En vain ! l'histoire aura raison du passé.

Une Princesse polonaise, la famille de SUARES d'ALMEDA occuperont les lieux jusqu' à la fin des années trente, c’est à cette famille le “re-couronnement “ des deux tours de la façade nord.

Durant la seconde guerre c'est l'Armée de l'Air qui prend possession des lieux, mais en novembre 1945 un incendie ravage une partie de la toiture du corps de logis, commence alors dans années cinquante une longue période de décrépitude et de pillages. 

La rénovation de la bâtisse, effectuée entre 1981 et 1988 a rendu à la belle demeure ses lettres de noblesse. Rebâti selon les indications des précieux et rares baux à besognes retrouvés après la guerre, le château a retrouvé ses magnifiques voûtes gothiques, ses assises en cul de lampe et ses animaux héraldiques ont repris leur place sur les glacis de pierre au fronton des fenêtres à meneaux.

Sculptée sur le tablier du pont de la façade sud, la salamandre, emblème de François I° veille encore sur la demeure depuis le XIV° siècle.

 

Pour plus d’informations :

*Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France Tome LVI (1996) par Henri GINESTY et Bruno TOLLON

 *La Revue du Comminges” via Généanet (A 1988 T101) par Bernard POUSTHOMIS archéologue au sein du bureau d'études HADÈS qu'il a créé en 1994 et dont le siège est à Toulouse

Le chateau avant et après

OUVRONS LES GRILLES DU CHÂTEAU !

Le nouveau propriétaire du château est maintenant l’État, ne voulant pas le voir dépérir et ne regarder qu'à travers les grilles, nous avons tout mis en œuvre auprès des service du Patrimoine pour pouvoir en disposer.  Nous avons la joie de vous informer de la signature d'une convention d'utilisation du jardin du Château, bientôt un nouvel espace détente offert à tous !

Mais avant de déambuler dans les allées... un gros travail a été opéré durant quelques semaines !

Les élus, en premier, ont bravé les éléments et ont commencé à débroussailler, tailler...

Un appel aux bonnes volontés auprès des administrés a été fait pour poursuivre cette mission afin de pouvoir vous offrir au plus tôt ce bel espace de déambulation !

Bon visionnage du travail effectué !!